Un logement gratuit mais imposé lourdement

© Thinkstock

Si vous êtes gérant d’entreprise et occupez à titre gracieux un logement appartenant à votre entreprise ou loué par cette dernière, vous êtes imposé sur un avantage de toute nature. Quelles règles fiscales s’appliquent-elles ?

Il arrive fréquemment que des gérants d’entreprises fassent acheter des logements ou autres biens immobiliers à leur société. Plusieurs motivations sont envisageables, mais une chose est sûre : l’avantage fiscal de la formule pèse lourd dans la balance. Les sociétés peuvent en effet imputer tous les coûts liés à la propriété d’un bien immeuble au titre de frais déductibles. C’est le cas notamment des frais de rénovation et d’entretien, des primes d’assurance, des charges fiscales comme le précompte immobilier et des intérêts d’emprunts contractés pour acquérir les biens en question. Logement gratuit Dans la plupart des cas, les gérants d’entreprises ne paient aucun loyer en échange de l’usage personnel du logement appartenant à leur société. Ils doivent cependant tenir compte d’un avantage de toute nature imposable, le cas échéant. En d’autres termes, ils doivent s’acquitter d’impôts sur un montant estimé forfaitairement sur la base du revenu cadastral. Ce calcul forfaitaire implique que l’administration ne tient pas compte du coût effectif du loyer. Dans la pratique, généralement, le gérant d’entreprise se voyait souvent invité à payer un impôt moins lourd que le loyer réel qu’il aurait dû verser s’il avait loué le logement à un tiers. Cette imposition intéressante a cependant été remise en cause il y a quelques années par le gouvernement Di Rupo. Avantage de toute nature imposable A combien s’élève l’avantage imposable depuis cette modification ? L’avantage est toujours déterminé forfaitairement sur la base du revenu cadastral (RC) de l’habitation. Si le RC non indexé est inférieur ou égal à 745 euros et que le logement n’est pas meublé, c’est la formule suivante qui s’applique : RC indexé x 100/60 x 1,25. Si le bien loué ayant un RC non indexé inférieur ou égal à 745 euros est meublé, la formule devient : RC indexé x 100/60 x 1,25 x 5/3. Si le RC non indexé est supérieur à 745 euros — ce qui est souvent le cas, le coefficient de 1,25 bondit à 3,8, soit : RC indexé x 100/60 x 3,8. Pour un logement meublé ayant un RC non indexé supérieur à 745 euros, la formule est la suivante : RC indexé x 100/60 x 3,8 x 5/3. Pour l’année de revenus 2014, les RC non indexés sont multipliés par un coefficient d’indexation de 1,7. Exemple Imaginons qu’une société mette gratuitement un logement ayant un RC non indexé de 1.500 euros à disposition de son dirigeant. Le bien n’est pas meublé. Le gérant d’entreprise est alors imposé annuellement sur un avantage de toute nature de 1.500 x 1,7 (coefficient d’indexation 2014) x 100/60 x 3,8 = 16.150 euros. Ce montant vient s’ajouter aux autres revenus imposables du gérant d’entreprise, ce qui signifie qu’il paiera un impôt de maximum 50 % — plus taxe communale — sur cette somme, et que ce revenu sera aussi soumis au paiement de cotisations sociales. Si le bien est meublé, l’avantage imposable de toute nature sera égal à 1.500 x 1,7 x 100/60 x 3,8 x 5/3 ou 26.917 euros. L’avantage imposable peut donc être substantiel et il est dès lors parfois plus intéressant de payer le loyer réel pour réduire cet avantage. Appliqué à notre exemple, ce scénario se traduit de la manière suivante : un logement non meublé induit un impôt annuel de 16.150 euros divisé par 12, soit 1.346 euros par mois. Si le gérant d’entreprise pouvait payer un loyer réel inférieur à ce montant, il aurait tout intérêt à privilégier cette option au lieu de celle du logement gracieusement offert par sa société. Usage privé partiel Imaginons à présent qu’un logement est utilisé à 70 % à titre privé par le gérant d’entreprise et à 30 % à titre professionnel par la société, que le bien est frappé d’un RC non indexé de 1.000 euros et qu’il n’est pas meublé. L’avantage imposable de toute nature sera alors égal à 1.000 x 70 % (usage privé) = 700 euros x 1,7 (coefficient d’indexation 2014) x 100/60 x 1,25 = 2.479 euros. Notons que dans cet exemple, nous tenons compte du coefficient de 1,25 et non de 3,80. Le RC non indexé du logement auquel le calcul doit être appliqué est en effet inférieur à 745 euros. Réduction de l’avantage Dans certains cas, l’avantage de toute nature peut être réduit. Selon le fisc, c’est notamment le cas lorsque “le dirigeant d’entreprise est contraint d’occuper un logement dont l’importance excède manifestement ses besoins personnels”. Le cas échéant, l’avantage peut être calculé sur la base du RC d’un logement qui satisferait aux besoins du gérant d’entreprise. Contrainte d’occupation Il doit cependant s’agir d’une contrainte d’occupation. C’est le cas, d’après le fisc, lorsqu’une société oblige un gérant d’entreprise à occuper un logement pour des raisons contraignantes liées à l’exercice de ses fonctions au sein de la société et qu’il n’existe aucune alternative répondant plus fidèlement aux besoins du gérant d’entreprise. Il faudra alors démontrer que si le gérant d’entreprise occupait un autre bien immeuble que celui mis à sa disposition par la société, l’activité de cette dernière en serait lourdement entravée, voire impossible. Besoins personnels Le logement mis à disposition doit excéder de manière incontestable les besoins du gérant d’entreprise, sur la base de son statut social et de la composition de son ménage. Le fisc tient compte en l’occurrence de la superficie habitable, du nombre de chambres, de l’endroit où le bien est situé, du type du logement, de son équipement, etc. En revanche, le fisc juge non recevable l’argument selon lequel, par exemple, le gérant d’entreprise aurait autant de chambres que d’enfants alors qu’il pourrait se contenter de partager une chambre unique.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content