L’exportation en 6 leçons

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Le nombre de pays exportateurs ne cessant de croître, les entreprises belges ont de plus en plus de difficultés à écouler leurs produits à l’étranger. Une communication et un marketing internationaux de qualité sont devenus incontournables.

En 2011, les entreprises belges ont exporté pour 344 milliards d’euros de biens et services – soit 2,6 % du marché mondial – ce qui leur permettait de caracoler à la 10e place des principaux pays exportateurs. En 2010, on devait 82,5 % de ces exportations à la Flandre, 15,5 % à la Wallonie et 2 % à Bruxelles.

Mais les pays exportateurs traditionnels sont aujourd’hui confrontés à la concurrence sans cesse croissante des marchés émergents, comme le montrent les chiffres de l’agence Flanders Investment & Trade (FIT), qui a consacré une récente étude au commerce international. En 2000, les 10 plus grands pays exportateurs (avec, à leur tête, la Chine, l’Allemagne et les Etats-Unis) représentaient 56 % des exportations dans le monde. Ce pourcentage plafonne désormais à 50 % mais sans l’explosion de la croissance de la Chine – de 3,9 % en 2000 à 10,4 % en 2010 – la chute aurait été beaucoup plus rude. Les économies émergentes comme l’Inde, le Brésil et la Thaïlande talonnent aujourd’hui les pays présents dans ce top 10.

1- Eviter d’y aller à l’intuition

Que les patrons de PME belges ne s’imaginent pas qu’un bon produit se vendra de lui-même. “En Belgique, les entreprises promeuvent et écoulent en partie à l’intuition, analyse Carla Christiaens, conseillère en exportations auprès de Flanders Investment & Trade. Proches des clients, elles font généralement les bons choix, ce qui leur permet de vendre. Mais plus le pays visé est éloigné, moins on en connaît les us et coutumes.” De sorte que l’avantage “du nid” ne joue plus, et que les firmes finissent souvent par se replier sur la production, abandonnant l’intégralité de la communication aux vendeurs, par exemple.

De nombreuses entreprises, même importantes, ne connaissent pas suffisamment les avantages de leur produit et les besoins de leur groupe cible. Cela mène alors à une communication inappropriée, et parfois même non professionnelle, sur le marché de l’exportation. “Effectuez les études de marché qui s’imposent et rendez visite aux clients, conseille Bernhard Adriaensens, professeur à la Solvay Business School et chargé du marketing international dans le cadre de l’International Trade Executive Programme, projet actuellement en chantier dont Rudi Thomaes, CEO de de la Fédération des entreprises de Belgique, est la cheville ouvrière. Trop d’entreprises belges se préparent mal. Il ne suffit pas de sauter dans un avion pour aller vendre.” Bien des sociétés pèchent par leur manque d’expérience en matière d’études qualitatives du marché. Par conséquent, elles doivent procéder de façon plus structurée. “L’entreprise n’a pas l’habitude de vendre à l’étranger ? Elle va devoir s’adapter, recommande Carla Christiaens. Parfois, il lui faudra changer complètement de mentalité pour passer du statut de firme productrice à celui de société orientée marketing.”

2 – Proposer mieux que le concurrent local

Pour qu’une entreprise ait une chance de percer chez un client allemand ou italien, il faut que ses produits soient meilleurs que ceux du concurrent sur place. Citons, à titre d’exemple, le spécialiste des ressources humaines SD Worx qui, à l’étranger, tente de se démarquer en proposant une offre internationale. L’erreur est souvent de croire que l’ unique selling proposition (USP), bien accueillie en Belgique, se confirmera ailleurs. L’important est de chercher l’avantage que l’acheteur a à acquérir ce produit plutôt qu’un autre, local. Mieux on connaît la réponse, plus efficacement on se positionne vis-à-vis des concurrents et plus percutants sont les arguments. Une fois cet avantage identifié, il convient de le traduire en un slogan convaincant, qui ne sera d’ailleurs pas nécessairement le même dans tous les pays.

3 – Marketing de guérilla : attention aux sensibilités culturelles !

Après avoir consulté ses partenaires, la biscuiterie Dandoy, qui prépare son installation sur le marché nippon ( lire l’encadré en p. 64), a confié à des firmes locales la communication et le marketing sur place : le fossé socioculturel et économique qui sépare nos deux pays est tel que l’entreprise a estimé ne pas pouvoir le franchir seule. Une telle prudence s’impose, notamment pour les petites entreprises qui, faute de disposer de budgets extensibles, optent par exemple pour le “marketing de guérilla” (qui consiste à se faire remarquer par un coup de pub ou une action singulière bon marché destinée à attirer l’attention des médias) : ce type d’action est parfois hasardeux et il serait regrettable de choquer pour avoir négligé des différences culturelles, au risque que l’initiative fasse à la firme une publicité négative. Le fait de devoir tenir compte des usages en vigueur dans un pays où l’on est actif n’est toutefois pas une raison pour multiplier les logos et les styles maison : mieux vaut opter pour une identité visuelle reconnaissable partout, et à la fois adaptée aux différents marchés.

4 – On n’est jamais mieux servi que par soi-même ? A voir…

Réussir à l’étranger, c’est aussi, dans une large mesure, savoir choisir les bons partenaires, qui seront au fait de la législation locale en matière de communication et sauront adapter le message au marché. Ce qui n’est certes pas toujours facile. Vervloet, une société familiale située à Molenbeek-Saint-Jean, spécialisée en ferronnerie artisanale et ferronnerie du bâtiment (loquets de portes, poignées de fenêtres…), refuse par exemple désormais de donner à ses partenaires l’exclusivité pour une région, limitant ses contrats à des projets particuliers. Avant de s’établir au Japon, la Maison Dandoy s’est constitué une équipe de spécialistes en communication, en droit et en logistique, notamment. Elle a conclu un accord de partenariat avec la firme nipponne C’Select ; le contrat prévoit en outre une étroite collaboration avec Daimaru, un genre de Harrods japonais. De cette manière, la biscuiterie peut s’appuyer sur une machine de communication et de marketing parfaitement huilée pour communiquer avec la presse locale.”

5 – Les salons professionnels : un pied dans la porte

La communication est largement déterminée par la nature de l’entreprise, affirme le professeur de marketing Bernhard Adriaensens. “La communication B2B est totalement différente d’une communication B2C, par exemple. L’entreprise B2C qui veut atteindre le client final doit se distinguer pour convaincre. L’entreprise B2C a, quant à elle, moins de clients, ce qui facilite la communication personnelle, qui s’articule autour de visites individuelles, de participations à des salons professionnels ou à des événements.”

“Nous nous faisons connaître sur les marchés étrangers par le biais de salons professionnels, confirme Isabelle Hamburger, administratrice de la société Vervloet, qui écoule ses garnitures de portes et de fenêtres au Moyen-Orient, aux Etats-Unis et en Russie, entre autres. Cela permet de nouer des contacts pour la suite, car les relations personnelles sont et restent un must. J’essaie de bien m’imprégner des besoins du client et de connaître son budget, le tout pouvant être très différent d’une personne à l’autre. Pour atteindre la clientèle, nous passons surtout par les mailings électroniques et les réseaux sociaux.”

6 – Vous n’êtes pas chasseur ? Soyez proie

Le professeur Leo Sleuwaegen (KU Leuven) estimait en 2010 que 24 % des PME belges vendaient à l’étranger. Cependant, “40 % des entreprises exportatrices sont contactées par des clients étrangers en quête d’une solution, constate Bernhard Adriaensens. Il faut être prêt à leur répondre.” En effet, “si vous ne voulez pas aller à la montagne, laissez la montagne venir à vous”. Comment ? Tout d’abord, en faisant en sorte d’être facilement accessible. En élaborant un site web multilingue qui s’adaptera automatiquement aux divers secteurs et groupes-cibles. En investissant éventuellement dans le marketing par moteur de recherche, pour être bien référencé dans Google. Par ailleurs, il est indispensable que la logistique soit prête à livrer à l’étranger et que le personnel soit disposé à répondre aux clients dans plusieurs langues.

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