Aldi et Lidl reviennent dans la course

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Etonnamment, Aldi et Lidl n’avaient jusqu’à présent pas profité de la crise. Mais depuis deux mois, les “hard discounters” allemands sont à nouveau plébiscités par les consommateurs belges. Explications.

On les disait mieux armés pour faire face à la crise. Et pourtant, les hard discounters Aldi et Lidl n’avaient, jusqu’à présent, pas profité de la crise ni de la reprise de la consommation en 2010. En 2009 et 2010, selon le bureau Marketing Map, qui réalise chaque année une radioscopie du marché de la distribution alimentaire, ils avaient même perdu du terrain. Leur part de marché qui s’élevait en 2008 à 16,2 % (11,7 % pour Aldi et 4,5 pour Lidl) est descendue à 15,8 % (respectivement 11,4 et 4,4 %) en 2009 et à 15,7 % (11,1 et 4,6 %), l’an dernier.

Mais le vent a tourné. Selon Comeos, la fédération belge de la distribution, les ventes des enseignes allemandes ont augmenté de 5 % en septembre 2011 par rapport au même mois de l’année dernière et, en octobre, leur progression se chiffrait à 8 %. “Les hard discounters n’avaient pas profité de la crise financière mais depuis deux mois, on sent une concurrence accrue de la part d’Aldi et Lidl, qui sont très agressifs sur le plan publicitaire”, a confirmé Gérard Lavinay, le directeur exécutif de Carrefour Belgium, qui était la semaine dernière l’invité des Midis de Trends-Tendances.

Le niveau de 2008 pas encore récupéré

“Généralement, en période de crise et de contraction du pouvoir d’achat, les hard discounters gagnent un peu de terrain. C’est le cas actuellement. Depuis le mois de septembre, la part de marché d’Aldi et Lidl est en progression”, précise Dirk Vanderveken, le directeur de GFK Panel Services sans lâcher de chiffre. Toutefois, nuance-t-il, ceux-ci n’ont pas encore récupéré leur part de marché de 2008. “L’inflation des prix alimentaires les avait alors moins pénalisés que les distributeurs de marques nationales mais ils ont ensuite été rattrapés par la crise conjoncturelle. La population de ces enseignes est souvent modeste et souffre plus que les autres de la crise”, analyse l’expert. Autre explication, à ses yeux : les distributeurs traditionnels ont les armes pour se battre. Leur politique de prix est plus agressive via entre autres le développement de leur assortiment de marques propres et “premiers prix” (365 chez Delhaize, Carrefour Discount ou Everyday chez Colruyt). Souvenons-nous, il y a un an Delhaize avait lancé l’action “Moins cher que le moins cher de chez Aldi”.

On n’y va plus pour les prix mais…

Aussi étonnant que cela puisse paraître, si Aldi et Lidl reviennent dans la course, ce n’est plus à cause de leurs prix. La dernière enquête annuelle de Test-Achats qui passe à la loupe les prix de la grande distribution en Belgique, a démontré que, de manière générale, les hard discounters n’étaient pas les supermarchés les moins chers. Pour les produits “premiers prix”, Aldi et Lidl sont respectivement plus chers de 20 et 23 % que la marque Everyday de Colruyt.

Un des grands moteurs de croissance d’Aldi et Lidl a été leur politique d’expansion. Avec près de 450 points de vente, Aldi est l’enseigne la plus représentée en Belgique. Entre 2005 et 2009, les chaînes ont ouvert une centaine de supermarchés, soit une dizaine chacune annuellement. Mais ce rythme fléchit. Et les velléités d’Albert Heijn (Ahold), qui ambitionne d’implanter 50 magasins dans le pays dans les cinq prochaines années, accentuent encore la concurrence dans un marché déjà sous pression.

… pour l’assortiment qui monte en gamme

D’après le responsable de GFK Panel Services, les distributeurs allemands essayent de compenser la baisse des ouvertures par une hausse du ticket de caisse. Pour cela, ils mettent davantage en avant des produits haut de gamme comme des grands crus ou des mets festifs, plus chers. Lidl, qui compte près de 300 supermarchés dans le Royaume, continue à étoffer son assortiment de marques. Par ailleurs, la plupart de ses succursales sont dotées d’un rayon de pains frais avec un choix étendu de viennoiseries et de baguettes. “Le pain est l’un des produits les plus achetés en grandes surfaces”, remarque Gino Van Ossel, professeur spécialisé dans la distribution à la Vlerick School. L’initiative est suivie de près par Colruyt qui teste l’expérience dans certains points de vente.

Le concept de magasins Lidl évolue. “Nous mettons l’accent sur les produits frais du jour (légumes, fruits, viande, etc.) de meilleure qualité au prix le plus bas”, insiste-t-on au siège de la chaîne allemande qui se profile de plus en plus comme un magasin de proximité, un format prisé par les consommateurs. L’enseigne a aussi renforcé sa politique de communication en lançant des publicités en radio. Aldi teste également un magasin plus haut de gamme dans la région de Gand. Les hard discounters sont-ils en train de revoir le business model qui a fait leur succès ?

SANDRINE VANDENDOOREN

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