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Qui était G.C. Marshall ?

Il pourrait bientôt avoir un homologue européen, qui, dit-on, pourrait sauver la Grèce, sauver l’Espagne, et finalement sauver l’euro. Mais qui est en fait ce monsieur Marshall ?

Nous le connaissons si bien et très mal à la fois. Son nom revient souvent en Wallonie, car il y a son propre plan, et même son deuxième plan, aux accents plus verts. Il pourrait bientôt avoir un homologue européen, qui, dit-on, pourrait sauver la Grèce, sauver l’Espagne, et finalement sauver l’euro. Mais qui est en fait ce monsieur Marshall ?

Inventeur du Win – Win

Secrétaire d’Etat américain aux affaires étrangères à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, G.C. Marshall a proposé en 1947 un plan d’aide aux pays européens (l’European Recovery Program). Le but d’une telle manoeuvre n’était d’ailleurs pas uniquement économique : il s’agissait de contrer la montée du communisme et de pousser à la réconciliation européenne, en conditionnant l’aide à une proposition conjointe des pays européens. Mais bien entendu, l’objectif comportait surtout un volet économique crucial. La polarisation du monde en deux camps nécessitait de se rassembler sous la bannière d’une puissance économique et militaire forte. La conférence de Bretton Woods en 1944 avait déjà entériné le leadership des Etats-Unis pour le bloc “de l’ouest” : le Royaume-Uni exsangue lui avait passé le flambeau, y compris sur le plan monétaire : toutes les monnaies se définiraient désormais par rapport au dollar, qui était la seule devise librement convertible en or, au grand regret du négociateur britannique… un certain J. Keynes.

Mais voilà, l’appareil industriel américain en pleine croissance contrastait avec l’industrie européenne à terre. Alors que les échanges devaient être favorisés par les accords de Bretton Woods, ils n’auraient pu être que très déséquilibrés. Pire encore, ils étaient inexistants : comment les pays européens auraient-ils pu payer leurs importations de produits américains, puisque l’absence d’exportations les empêchait d’obtenir les dollars nécessaires, à l’heure où la plupart des monnaies étaient encore inconvertibles ? Pour la petite histoire, c’est notamment par manque de dollars que l’armée belge s’est équipée à l’époque de Landrover (produites à Anvers sous l’appellation Minerva) et non de la fameuse Willys Jeep américaine. Bien que moins performante aux tests réalisés par l’armée belge, la Landrover avait l’avantage d’être payé en livres, et non en dollars.

C’est dans ce contexte que G.C. Marshall proposa en 1947 un don, en dollar, pour favoriser la reconstruction de l’Europe. Ce don, proportionnel aux besoins, allait permettre la reconstruction plus rapide de l’Europe, tout en lui fournissant les dollars dont elle avait tant besoin… pour s’équiper en biens américains notamment. Tout le monde y trouvait donc son compte, puisque le plan Marshall renforçait les liens économiques entre les Etats-Unis et l’Europe, en assurant une croissance forte à l’Europe et des débouchés pour les exportations américaines. On notera enfin que la Belgique n’a reçu qu’une part assez modeste de l’aide. Sa spécialisation dans l’industrie de base, moins détruite par les bombardements, la mettait dans une position relativement meilleure que ses voisins.

Quelle leçon de l’histoire ?

Au moment où la relance de la croissance revient au-devant de la scène, il n’est donc pas inutile de rappeler ce petit bout de l’histoire économique européenne. Un vrai plan Marshall est donc (i) un don et non un prêt, (ii) consenti par le leader qui en a les moyens (les USA à l’époque, l’Allemagne et ses proches partenaires peut-être bientôt), (iii) dans un but de renforcer la cohésion européenne, (iv) ce qui serait à l’avantage tant des bénéficiaires que des bailleurs de fonds. Mais surtout, (v) un plan Marshall doit accroître l’appareil productif et la productivité des pays bénéficiaires. Ceci constitue un point crucial : financer la construction de gares et de halls sportifs aide certes un peu l’activité dans l’un ou l’autre secteur, mais manque complètement la cible d’un tel plan. L’histoire plus récente ayant montré l’incapacité de certains gouvernements européens à utiliser intelligemment les aides reçues (fonds structurels, autres programmes de développement, etc.), un nouveau plan d’aide, par l’intermédiaire de fonds structurels ou de la Banque européenne d’investissement (BEI) devra être, selon moi, conditionné à un contrôle strict de l’utilisation des fonds par les donateurs, ou à tout le moins par un organisme indépendant, et non par les bénéficiaires eux-mêmes.

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